Endocardite
infectieuse
Infection d’une ou plusieurs valves
cardiaques, plus rarement de l’endocarde pariétal, par un micro-organisme, bactérie
le plus souvent, plus rarement germe intracellulaire ou levure. Cette infection est responsable à la fois
de proliférations (« végétations ») et de destructions, en
particulier des valves du cœur.
L’endocardite infectieuse est aussi
appelée « endocardite bactérienne » ou « endocardite
d’Osler ».
« L’endocarde » correspond au revêtement interne des cavités du cœur
et aux valves cardiaques.
Une « valvulopathie » est une altération d’une valve.
Le cœur :
Le cœur se compose de 4 cavités, couplées deux par
deux, qui forment 2 pompes juxtaposées et synchronisées : le
« cœur droit » et le « cœur gauche ».
Chacun des deux cœurs est constitué d'une petite cavité, « l'oreillette »,
qui accumule le sang à partir des veines pendant la contraction du ventricule
et se contracte ensuite pour remplir la véritable pompe : le « ventricule »,
chargé d’éjecter le sang dans une artère lors de sa propre contraction.
La circulation du sang se fait à sens unique grâce à 4 valves cardiaques situées
à la sortie des oreillettes et des ventricules : elles s'ouvrent et se
ferment alternativement comme des clapets et empêchent le retour sanguin.
Deux valves siègent entre les oreillettes et les ventricules (la valve mitrale
dans le cœur gauche et la valve tricuspide dans le cœur droit).Les deux autres
sont situées entre les ventricules et l'artère correspondante (la valve
aortique à la sortie du cœur gauche et la valve pulmonaire à la sortie du cœur
droit).
Le cœur est recouvert de deux fines membranes protectrices : « l’épicarde »,
qui est l’enveloppe externe, et « l’endocarde », qui est l’enveloppe
interne.
Endocardite infectieuse
L’endocardite bactérienne est une maladie infectieuse secondaire
à la prolifération de bactéries sur le revêtement interne du cœur
(« endocarde »).
Une endocardite infectieuse survient lorsque des bactéries entrent dans la
circulation sanguine (lors d’une infection ou d’un geste médical ou dentaire)
et qu’elles se fixent et s’accumulent sur une partie endommagée d’une valve ou
de la paroi interne du cœur pour l’aggraver.
La lésion infectieuse élémentaire de l’endocardite est la colonisation par
des bactéries circulantes du sang d'une lésion fibrino-plaquettaire initialement
stérile qui se développe sur une lésion de l’endocarde. À l'occasion de la circulation
d’une bactérie dans le sang (« bactériémie »), les bactéries peuvent
adhérer à cette prolifération fibrino-plaquettaire et s'y multiplier
(« prolifération bactérienne »), avec pour conséquence l’apparition
de lésions proliférantes : les « végétations ». Mais, les
bactéries peuvent également former des abcès à l’origine d’ulcérations des
composants de l’endocarde. La conséquence est le développement de lésions
infectieuses associant des végétations infectées, lésions proliférantes
constituées d'amas de fibrine, de plaquettes et de micro-organismes, et des
lésions de destruction valvulaire, ulcérations et perforations.
Lorsqu’elles sont localisées sur les valves, ces lésions nuisent à leur
étanchéité : un reflux de sang peut se produire, c’est-à-dire circuler en
sens inverse. Ce problème est appelé « régurgitation »,
« insuffisance valvulaire ». Une valve sténosée (rétrécie) peut faire
obstacle à la circulation du sang à l’intérieur du cœur. Si la gêne à la
circulation du sang est importante, cela va perturber le fonctionnement du
cœur, parfois sévèrement (« insuffisance cardiaque aiguë »).
L'extension de l'infection aux structures voisines peut conduire à d'autres
lésions comme la rupture des attaches de certaines valves (« cordages
mitraux ») ou des abcès myocardiques (notamment septal en cas
d'atteinte aortique).
Les végétations peuvent être à l'origine de manifestations infectieuses et
immunologiques à distance par essaimage dans la circulation sanguine
artérielle de bactéries qui vont se fixer dans différents organes avec
constitution de foyers septiques secondaires, et recirculation
d'antigènes et de complexes immuns qui peuvent se déposer et entraîner des
« lésions de vascularite ». Les endocardites peuvent donc se
compliquer de troubles cardiaques ou vasculaires, ainsi que d’infection
généralisée (choc septique voire septicémie).
Au niveau des artères, la conjonction des lésions de vascularite d'origine
immunologique et des emboles septiques dans les petits vaisseaux de la paroi
artérielle (« vasa vasorum ») peut aboutir à une faiblesse de la
paroi artérielle avec dilatation secondaire : un « anévrisme mycotique »,
caractérisé par une paroi fragile, avec un risque élevé de rupture, qui peut
être responsable d'hémorragies à l’intérieur des organes (« hémorragies
viscérales »).
Les signes de l’endocardite infectieuse
L’endocardite est une infection généralisée de
présentation polymorphe. Lorsque des signes cardiaques s'associent à des signes
infectieux, le diagnostic est aisément évoqué. Il est plus difficile lorsque
les manifestations cliniques sont très variées, diversement associées, et à
l'origine de présentations parfois très trompeuses.
• Les endocardites infectieuses se traduisent le plus souvent par
des signes généraux peu spécifiques : une fièvre, des frissons,
une faiblesse, une fatigue, des douleurs articulaires et musculaires,
des sueurs nocturnes, un essoufflement, une toux persistante, un
gonflement des jambes, une perte de poids inexpliquée.
• Dans certains cas, des signes sont présents sur la peau (5 à 15%
des cas). De petites hémorragies (« purpura pétéchial ») peuvent
ainsi apparaître sous la peau des jambes, aux conjonctives et sur les muqueuses
de la bouche et évoluer par poussées. Un abcès peut se former au bout d’un
doigt (« faux panaris »).
Des nodosités peuvent être observées à la pulpe des doigts ou des
orteils, sur l'éminence thénar ou hypothénar ou sur les oreilles : il
s’agit des nodosités d'Osler (ou « faux panaris ») dont la valeur
diagnostique est très forte (« pathognomonique »). Souvent précédé
d'une sensation douloureuse, le nodule, de la taille d'une lentille rouge ou
violacée, est fugace et disparaît après quelques jours sans laisser de
trace : il doit être recherché à l'interrogatoire. Des placards
rouges (« érythémateux ») sur la peau des paumes des mains et des
plantes des pieds (« placards érythémateux de Janeway ») sont plus
rares.
Un purpura conjonctival au niveau des yeux est considéré comme évocateur
du diagnostic d'endocardite infectieuse. Tout comme les « taches de
Roth » au fond d'œil : elles sont constituées d'hémorragies associées
à des exsudats blanchâtres.
• Des manifestations rhumatologiques sont fréquentes. Il s'agit
de douleurs des articulations des membres (« arthralgies ») ou des
muscles (« myalgies »), des douleurs lombaires (« lombalgies »)
qui vont faire rechercher une infection de la colonne vertébrale (« spondylodiscite »),
ou des articulations (« arthrites »).
• Des signes neurologiques sont observés dans 15% des cas et sont
parfois inauguraux. Leurs mécanismes sont divers (et parfois intriqués),
associant embolies infectieuses, anévrismes artériels, abcès et méningites.
Ces lésions peuvent se compliquer d'infarctus et surtout d’hémorragies
cérébrales ou cérébro-méningées. Leur expression clinique est variée.
• Il existe des atteintes rénales spécifiques de l'endocardite (protéinurie
ou hématurie isolée mais aussi insuffisance rénale par atteinte glomérulaire),
à distinguer des autres causes possibles d'atteintes rénales au cours de
la maladie (néphropathies interstitielles secondaire à une toxicité
médicamenteuse, atteinte rénale secondaire à l'insuffisance cardiaque,
infarctus par emboles rénaux).
• Lorsque l’endocardite provoque une gêne cardiaque importante, des signes
d’insuffisance cardiaque apparaissent : essoufflement marqué, voire perte
de connaissance.
Au final, le diagnostic d’endocardite infectieuse doit être évoqué
systématiquement chez tout sujet fébrile ayant un souffle valvulaire, et des
hémocultures doivent alors être réalisées.
Les
causes de l’endocardite infectieuse
Autrefois maladie du jeune adulte porteur d'une
valvulopathie préexistante parfaitement identifiée (« valvulopathie
post-rhumatismale » ou « cardiopathie cyanogène congénitale »),
l’endocardite infectieuse touche désormais des personnes plus âgées, dont
une proportion significative n'est pas identifiée comme souffrant d’une
valvulopathie.
Depuis l’éradication en France du « rhumatisme articulaire aigu »,
les valvulopathies rhumatismales ont progressivement disparu (quelques cas
d’importation chez des personnes immigrées), mais d'autres facteurs
prédisposant sont apparus : la toxicomanie par injection intraveineuse,
les prothèses valvulaires, les scléroses valvulaires dégénératives liées au
vieillissement de la population et la réalisation de plus en plus fréquente
d’actes invasifs à risque de bactériémie au cours des procédures de soins
(« endocardites nosocomiales »).
Si l’endocardite infectieuse résulte toujours de la colonisation par des
bactéries circulantes du sang d’une lésion fibrino-plaquettaire de l’endocarde,
initialement stérile, l'origine de la bactériémie, le micro-organisme en
cause et la nature des anomalies valvulaires ont considérablement évolué. Les
germes responsables de l’endocardite ont en effet changé : le staphylocoque est
maintenant le premier germe en cause et est responsable d'endocardites graves,
surtout dans un contexte de réanimation ou en post-opératoire. Le streptocoque occupe
la deuxième position, plus souvent actuellement les streptocoques du groupe D,
à point de départ digestif, que les streptocoques oraux.
Les
atteintes cardiaques à risque d’endocardite infectieuse
La lésion sous-jacente est plus souvent une atteinte
valvulaire (« valvulopathie ») du cœur gauche que du cœur
droit, plutôt une insuffisance qu'un rétrécissement valvulaire, et
elle intéresse surtout l'orifice aortique plus souvent que l'orifice mitral.
Dans près de la moitié des cas actuellement, l’endocardite survient chez
une personne au cœur apparemment sain, même si elle est parfois l'occasion
de découvrir une anomalie valvulaire jusque-là méconnue.
Le fait d'avoir une prothèse valvulaire constitue le facteur de
risque le plus élevé de survenue d'une endocardite infectieuse.
La porte d'entrée de l’endocardite n'est identifiée que dans la
moitié des cas : il peut s'agir d'un foyer infectieux, plus ou moins
évident, ou d'une situation (ou d'un geste) susceptible d'entraîner une
bactériémie.
Maladies cardiaques à risque d'endocardite infectieuse |
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Les
complications de l’endocardite
L'insuffisance cardiaque aiguë (par rupture ou perforation
de valve cardiaque) est la première cause de mortalité de l’endocardite
infectieuse à la phase aiguë de l’infection.
Elle est suivie par les complications neurologiques (accident
vasculaire ischémiques secondaire à la migration d’un morceau de valve ou de
végétation), les arythmies cardiaques et les troubles de conduction.
Les endocardites à staphylocoques et les endocardites sur prothèse valvulaire
sont associées aux taux de mortalité les plus élevés (jusqu’à 50% pour les
staphylocoques sur prothèse versus 10% pour les streptocoques oraux sur valve
naturelle). Les facteurs du pronostic à long terme sont moins bien connus.
L'année qui suit l'hospitalisation est marquée par une mortalité encore élevée,
puis la courbe de survie se stabilise pour devenir à peu près parallèle à celle
de la population générale et ne dépendre plus que de l'âge du malade.